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Père Charles Mallard-1er dimanche de Carême : Pour grandir dans la foi.

21 février 2021

Pour grandir dans la foi

1° dimanche de Carême – année B

Gn 9,8-15 ; Ps 24(25) ; 1 P 3,18-22 ; Mc 1, 12-25

Le premier dimanche de carême nous rappelle toujours les tentations de Jésus au désert. Selon les années le texte est pris chez l’un ou l’autre des évangélistes, et cette année, il s’agit du récit qu’en rapporte saint Marc. A vrai dire, récit est un bien grand mot, car il s’agit plutôt d’une allusion. Trois mots : « tenté par Satan ». Ceux qui ont eu une petite distraction ne les auront même pas remarqués ! On pourrait facilement penser que, pour éviter d’avoir un texte ridiculement bref, on a choisi de prolonger un peu la lecture de l’évangile par le début de la prédication du Seigneur. Pourtant ce serait oublier que le message de Jésus donne le ton du carême : « convertissez-vous et croyez à l’Évangile ». N’est-ce pas l’invitation qui nous a été faite mercredi dernier au moment de l’imposition des cendres ? Plutôt que de méditer en spectateur les aventures du Seigneur, laissons résonner sa parole puisqu’elle nous est répétée de manière insistante cette année.

Ces quarante jours sont donc un temps où nous sommes invités à « croire à l’Évangile », mais pour cela, il faut se convertir, c’est-à-dire changer, se retourner, se transformer. Il ne s’agit pas simplement d’adopter une idée mais de manifester une confiance : ça ne se passe pas dans notre tête mais dans notre vie.

Jésus donne le motif de cette invitation : « les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche ». On pourrait traduire aussi : « le règne de Dieu s’est approché ». La première chose que nous devons croire, c’est donc que Dieu est à portée de main. Or bien souvent, nous pensons le contraire. Dans le meilleur des cas, nous savons que la mort est le moment de la rencontre avec Dieu, mais pour être honnête, nous préférons que cela arrive le plus tard possible. La bonne nouvelle, c’est que nous n’avons pas besoin d’attendre la fin de notre vie pour rencontrer le Seigneur. Et cela change tout ! En particulier notre prière. Nous concevons souvent la prière comme un message que l’on adresse à Dieu, en espérant qu’il n’y aura pas trop d’obstacles administratifs célestes. Pourtant le carême est le temps où nous pouvons découvrir que la prière est d’abord une présence à la Présence de Dieu, un moment de proximité avec lui pour demeurer en sa présence. Si nous croyons à l’Évangile, nous ne pouvons pas prier comme les païens. Et c’est la première transformation du carême : faire de notre prière une occasion de rejoindre le Seigneur qui s’est approché de nous ; dans un dialogue et un cœur à cœur qui nous rapproche de lui.

La première lecture nous rapportait l’histoire de Noé. Après les quarante jours du Déluge, voici que la Parole de Dieu retentit : « j’établis une alliance avec vous ». Voilà une autre bonne nouvelle à laquelle nous devons croire. Le Seigneur s’engage avec nous et nous sommes engagés avec lui. Et le signe de cette alliance est l’arc-en-ciel, symbole de la paix. Sans doute Jésus n’a-t-il pas vu beaucoup d’arc-en-ciel dans le désert, mais c’est parce que la paix ne se limite pas à son signe, et c’est dans notre cœur et par notre comportement que nous devons être, nous-même, signes de l’alliance. Aussi, le carême nous invite-t-il à une autre transformation : celle de nos relations. C’est le souci du partage qui est l’expression de cette seconde conversion. Dépasser l’hostilité ou l’indifférence pour construire par la générosité et l’attention les uns aux autres une paix qui ne soit pas seulement un pacte de non-agression, mais le début de l’unité voulue par Dieu.

Enfin saint Pierre, dans la deuxième lecture, expliquait que le salut était préfiguré par l’arche de Noé, mais il avertit que ce salut demande certaines dispositions : « ceux-ci, jadis avaient refusé d’obéir, au temps où se prolongeait la patience de Dieu ». C’est que croire à l’Évangile comporte inévitablement une dimension d’obéissance à cet Évangile. La foi n’est pas une simple opinion, elle est une confiance et la confiance implique une conversion de la volonté pour se remettre entre les mains de celui à qui l’ont fait confiance. C’est le sens de la troisième transformation du carême : un certain dépouillement, une certaine sobriété pour ne pas s’appuyer sur le confort ou l’abondance, mais pour s’appuyer d’abord et seulement sur le Seigneur. Nos efforts de carême ne sont pas faits pour montrer notre courage ou notre force, mais pour que nous comptions toujours plus sur le Seigneur, en le faisant passer avant nos désirs ou nos besoins.

Oui, le temps de carême nous est donné pour grandir dans la foi, pour que nous croyions à l’Évangile un peu plus et un peu mieux. Nous ne grandirons pas dans la foi par des exploits ascétiques ou par des exercices psychologiques, mais en transformant notre prière pour qu’elle soit une présence à la Présence. Nous grandirons dans la foi en convertissant nos relations par le partage qui permet que la paix de l’Alliance soit plus large qu’un cercle amical. Nous grandirons dans la foi en tournant résolument notre vie vers le Seigneur et en renonçant à ce qui distrait notre volonté de sa Parole.

Que la Vierge Marie, avocate des Toulonnais, nous accompagne pendant ces quarante jours et fasse résonner en nous l’appel du Seigneur. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous rende attentifs à Celui qui s’est approché ; Reine de la Paix qu’elle nous apprenne à ouvrir nos cœurs aux dimensions du cœur de Dieu ; Porte du Ciel qu’elle nous attache à ce qui demeure, pour que nous puissions accueillir le règne de Dieu et resplendir du salut que propose le Christ qui a donné sa vie pour que nous puissions partager la sienne, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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