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Père Charles Mallard-Disciples ou foule de curieux

4 septembre 2022

Disciples ou foule de curieux

23° Dimanche du Temps Ordinaire – année C

Sg 9, 13-18 ; Ps 89 (90) ; Phm 9b-10.12-1 ; Lc 14, 25-33

En entendant l’évangile, il est bon de se souvenir du commencement de la liturgie de la Parole de ce jour : « Quel homme peut découvrir les intentions de Dieu ? Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? » C’est que l’enseignement de Jésus aux foules qui le suivaient peut paraître excessif, si ce n’est radical, et l’on reste perplexe sur ce qu’il faut en retenir. Mais le sage continuait : « qui aurait connu ta volonté si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? ». C’est un bon rappel de l’importance de lire la Bible dans l’Esprit qui l’a écrit et de ne pas se contenter de la recevoir avec nos émotions !

Pour entrer dans l’évangile, il faut imaginer la scène pour mieux saisir le contexte. « De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit ». Et par trois fois il conclut ses réflexions par « « il ne peut pas être mon disciples ». Un peu comme s’il y avait deux manières de suivre le Christ : celle de la foule et celle des disciples. Voyons ce qui les différencie.

Tout d’abord il y a une préférence pour le Christ, un choix personnel et fondamental. Évidemment ça ne veut pas dire qu’on n’aime personne d’autre : la préférence exprime une priorité et non pas une exclusion. On comprend bien que dans la foule il peut y avoir des gens qui sont là, entraînés par le mouvement, curieux ou suiveurs. Aussi Jésus demande une certaine qualité dans la motivation de ceux qui le suivent. C’est la liberté, non pas la liberté superficielle de venir ou de s’en aller, mais la liberté profonde du choix qui oriente et guide la vie. La liberté du « je le veux » et non pas du « rien ne m’en empêche ». Dans la deuxième lecture, on voit ainsi saint Paul préférer renvoyer Onésime à Philémon, plutôt que de le garder près de lui, pour que le bien soit fait volontairement et non par contrainte. C’est ainsi que la première condition pour être disciples de Jésus, c’est de le préférer à tout – y compris à nous-même : le faire passer devant nous, jusqu’au cœur de notre cœur.

Ensuite il faut « porter sa croix ». L’image nous parle d’autant plus que nous connaissons la suite de l’histoire, mais je ne sais pas ce que pouvaient comprendre ceux qui étaient là. L’expression laisse penser que tout le monde a une croix, et que l’option réside dans le fait de la porter, plutôt que de la fuir ou de la laisser porter aux autres. Il y a donc quelque chose de l’ordre d’un choix exigeant et persévérant. Une certaine cohérence qui est nécessaire pour suivre le Christ. Être disciple implique donc une responsabilité, dont Jésus le premier nous a montré l’exemple. Lorsque saint Paul demande à Philémon d’accueillir Onésime, on comprend qu’il y a une dimension de pardon. Il est difficile de savoir exactement ce qui est en jeu, mais il est certain que cela va demander à Philémon un certain effort. Si nous voulons être disciples de Jésus nous devons accepter qu’il ne nous conduise pas sur le chemin de la facilité, et que cela implique de le suivre jusqu’au bout même quand c’est exigeant.

Enfin Jésus évoque un renoncement. D’ailleurs il n’y a pas de choix sans renoncement. On se souvient que les premiers disciples ont tout quitté pour suivre le Seigneur. Et l’on imagine bien que ce ne devait pas être l’état d’esprit de tous ceux qui le suivaient. Certains comptaient bien faire un bout de chemin avec lui, puis rentrer chez eux vaquer à leurs occupations habituelles. Si pour la foule, suivre Jésus est une parenthèse dans leur vie, pour les disciples, c’est un engagement sans filet, sans porte de sortie. Cela rejoint ce que saint Paul demande à Philémon lorsqu’il lui dit de considérer Onésime non plus comme un esclave mais comme un frère. On est beaucoup plus impliqué dans une relation fraternelle que dans une relation de maître à esclave ! Être disciple de Jésus ce n’est pas le suivre pour un moment, c’est l’aventure d’une vie et d’une confiance.

Alors, même si l’évangile est un peu rude, il convient bien au début d’une année pastorale, parce qu’il nous invite à vérifier la qualité de notre suite du Christ. Il nous permet de faire le point sur notre état d’esprit et de voir quels moyens nous allons pouvoir prendre pour ne pas être une foule curieuse, mais de vrais disciples qui l’ont choisi librement, acceptant les exigences de cet appel, toujours plus impliqués à vivre ce qu’il nous propose.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse qu’elle nous apprenne à préférer le Christ en toute chose ; Secours des chrétiens qu’elle nous soutienne quand nous portons notre croix ; Reine des Saints qu’elle nous encourage à nous donner toujours plus et toujours mieux à celui qui s’est donné pour que nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en Dieu, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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