Aller au contenu

Père Charles Mallard-Embarquer avec le Christ

3 juillet 2022

Embarquer avec le Christ

14° dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Is 66,10-14c ; Ps 65 (66) ; Ga 6,14-18 ; Lc 10, 1-12.17-20

L’évangile nous rapporte un moment qui a sans doute marqué la mémoire des disciples : celui de la première mission. Élargissant le cercle des apôtres, Jésus en désigne soixante-douze pour aller au-devant de lui dans les localités où il allait se rendre. Si lors de l’appel des premiers il avait pris l’image du pécheur pour expliquer ce qu’il attendait, c’est maintenant l’image du moissonneur qu’il utilise. Sans doute une manière de ne pas s’enfermer dans les comparaisons ! Pêcheur ou moissonneur, ce qui compte c’est d’abord de préparer la rencontre avec le Seigneur. Voyons ce que cela suppose de notre part.

Il y a d’abord une sobriété qui témoigne d’une certaine urgence de la mission. « Ne portez ni bourse, ni sac, ni sandales, et ne saluez personne en chemin ». Il ne s’agit donc pas d’une promenade de santé ou d’un voyage d’agrément. La demande du Seigneur passe avant notre confort ou nos sécurités. Si l’on veut prendre une image maritime, on pourrait dire que la barque de l’Église n’est pas un yacht où l’on se repose mais un chalutier où l’on travaille ! Ça n’est peut-être pas très agréable à entendre au début de l’été, mais il est bon de réaliser que la vie spirituelle n’est pas un loisir mais une mission. L’évangile ne nous tourne pas vers nous mais vers Dieu et vers les autres. Ça ne signifie pas qu’il ne soit pas légitime de se reposer, mais comme dit l’Ecclésiaste il y a un temps pour tout. D’ailleurs la fin de l’évangile montre ce moment où chacun revient et partage ce qu’il a vécu. Il est normal qu’un bateau rentre au port, mais ce n’est pas très bon signe s’il y reste tout le temps ! Voilà peut-être un premier point de vigilance. Sans doute savons nous prendre le temps de goûter la Parole et de profiter de la présence de Dieu dans la prière, mais il ne faut pas oublier que nous devons aussi préparer la rencontre du Seigneur par le témoignage et l’engagement, annonçant la Bonne Nouvelle du Salut par la miséricorde et le service.

Ensuite Jésus invite les disciples à une disponibilité : restez quand vous êtes accueillis, partez quand vous ne l’êtes pas. On ne va pas s’acharner à pêcher là où il n’y a pas de poisson ! Cette disponibilité manifeste la liberté fondamentale indispensable à la vie spirituelle. Non pas la liberté de faire n’importe quoi, mais la liberté qui rend chacun responsable de ses choix. La liberté de celui qui annonce soulignant la liberté de celui qui entend. On pense à la réflexion de sainte Bernadette à son curé : « je suis chargée de vous le dire, pas de vous le faire croire ». La disponibilité dans la mission des soixante-douze nous rappelle que la vie spirituelle ne se mesure pas à l’efficacité mais à la profondeur de notre cœur. Savoir vivre l’instant présent, accueillir les circonstances comme un appel du Seigneur pour que les joies comme les épreuves soient une occasion de suivre le Christ dans la louange ou dans la confiance en Dieu – voilà ce que nous devons rechercher. Comme disait saint Paul dans la deuxième lecture : « ce qui compte c’est d’être une création nouvelle ; pour tous ceux qui marchent selon cette règle de vie, paix et miséricorde ».

Enfin la réflexion du Seigneur nous permet de ne pas nous tromper de priorité : « ne vous réjouissez pas parce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous parce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux ». C’est aussi ce dont témoigne saint Paul : « la croix de notre Seigneur Jésus Christ reste ma seule fierté ». L’amour de Dieu qui nous a sauvés est plus important que les avantages qu’on peut en retirer. C’est sans doute l’un des poisons les plus pernicieux de la vie spirituelle que de préférer le cadeau plutôt que celui qui le donne. Trop souvent nous recherchons le pouvoir plutôt que la communion parce que nous attachons plus d’importance à la terre qu’au ciel, au temps qu’à l’éternité, aux effets qu’à la cause.

En nous rappelant la mission des soixante-douze, l’évangile nous invite à retrouver le souffle de notre vie spirituelle. Par la sobriété qu’implique l’engagement, par la disponibilité qui permet la liberté, par l’attachement au cœur de Dieu nous pourrons goûter à la joie qu’annonçait le prophète Isaïe, la joie des serviteurs du Seigneur.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du matin qu’elle nous apprenne à être signes du Salut là où nous sommes. Trône de la sagesse qu’elle nous montre comment accueillir le don de Dieu. Porte du Ciel qu’elle guide nos regards pour que nos cœurs puissent battre au rythme du cœur de Dieu et que nous demeurions en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

Faire défiler vers le haut