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Père Charles Mallard-La parole nous saisit

11 juillet 2021

La parole nous saisit

15° dimanche du Temps Ordinaire – Année B

Am 7,12-15 ; Ps 84 ; Ep 1,3-14 ; Mc 6, 7-13

Quel texte extraordinaire que celui que nous avons entendu en deuxième lecture ! La prière de saint Paul nous plonge dans le cœur de Dieu et nous sommes saisis par la puissance de sa bonté : « Dieu le Père nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour ». Nous voilà situés dans le regard du Seigneur : depuis toujours et pour toujours. Comme Amos aux jours d’autrefois, la parole de Dieu nous saisit dans la banalité de notre vie pour nous appeler à l’extraordinaire de notre vocation. De la même manière, l’évangile rapportait la mission des apôtres : envoyés par le Christ ils vont porter la parole et goûter la puissance du Royaume. Les consignes que Jésus leur donne peuvent nous indiquer quelques repères pour vérifier que nous nous laissons saisir par la Parole.

D’abord ils sont envoyés deux par deux. Le détail a son importance, car c’est ce qui permet de ne pas s’approprier la parole. Le risque du messager, c’est de croire qu’il est l’auteur du message alors qu’il n’est que l’envoyé. La Parole de Dieu n’est pas notre parole. En allant deux par deux, les disciples témoignent qu’ils ne portent pas les idées de l’un ou de l’autre, mais un message qu’ils ont reçu et qui ne vient pas d’eux. C’est ainsi qu’Amos répliquait au prêtre de Béthel : « je n’étais pas prophète, ni fils de prophète » … en d’autres termes, je ne fais pas un métier, mais je réponds à une mission ; ce que je dis ne vient pas de moi mais de Dieu. Ainsi ce n’est pas nous qui saisissons la parole, c’est elle qui nous saisit. Et le premier signe, c’est que nous ne sommes pas seuls. Bien sûr nous pouvons l’écouter et la méditer dans le secret de notre cœur, mais nous ne la faisons retentir que lorsque nous sommes dans l’Église, avec d’autres. On gagne toujours à accueillir la Parole en la partageant, en accueillant la manière dont elle résonne chez ceux qui nous accompagnent.

Ensuite, Jésus donne des consignes de sobriété et même de pauvreté : « ne rien prendre pour la route, ni pain, ni sac, ni pièces de monnaie, ni tunique de rechange » ; à peine le nécessaire pour la marche : un bâton et des sandales. Ce dépouillement manifeste une espèce d’urgence, comme pour revenir à l’essentiel, et l’essentiel c’est la Parole. Si nous sommes saisis par la Parole, c’est elle qui prend toute la place et qui nous comble : on n’a pas besoin de s’assurer un plan B, on n’a pas besoin de faire des calculs ou des provisions : la Parole nous suffit. Tout au long de l’histoire, les saints ont connu ce moment où, pour accueillir pleinement la Parole, ils ont délaissé tout le reste ; acceptant de faire confiance à Dieu et à lui seul, en prenant le risque de l’inconfort matériel, affectif ou intellectuel. « C’est la richesse de sa grâce que Dieu a fait déborder jusqu’à nous » disait saint Paul. Bien sûr, nous pouvons prendre des conseils auprès des savants (même s’il ne suffit pas de se dire expert pour être compétent), mais pour l’essentiel, pour notre bonheur ou notre développement personnel – comme on dit aujourd’hui – où cherchons-nous la lumière ? La Parole de Dieu nous a-t-elle saisi au point que c’est en elle que nous puisons la sagesse de notre vie ?

Enfin il y a ces drôles de recommandations de profiter de l’hospitalité ou de secouer la poussière des pieds selon l’accueil réservé aux disciples. C’est comme si Jésus n’attendait pas d’eux une obligation de résultat, mais seulement de moyens. Il y a quelque chose de très libérant dans ces consignes : l’efficacité de la mission ne dépend de nous, mais de la Parole de Dieu … et aussi de la bonne volonté de ceux qui l’entendent. Se laisser saisir par la Parole c’est être plus attentif à la fidélité de notre témoignage qu’à ses résultats ; parce qu’il ne dépend pas de nous que les gens croient, mais il dépend de nous que la Parole soit correctement annoncée. En nous confiant de transmettre son enseignement, le Seigneur nous fait partager sa liberté et son amour, un amour qui ne peut que se proposer au risque d’être refusé.

La Parole de Dieu nous saisit quand elle révèle le mystère de sa volonté. Elle nous fait découvrir l’abondance de sa grâce, la prévenance de son amour et la grandeur de son appel. Si nous acceptons de nous laisser saisir, plutôt que de saisir ; si nous laissons la Parole guider nos choix et conduire nos vies, elle nous permet de déployer le don de Dieu pour vivre à la louange de sa gloire et parvenir jusqu’à sa présence.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Humble Servante du Seigneur, qu’elle nous apprenne la disponibilité de la foi ; Trône de la Sagesse qu’elle nous soutienne dans l’humilité de l’espérance ; Mère du Bel amour qu’elle nous garde dans la fidélité de la charité, pour que nous puissions demeurer en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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