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Père Charles Mallard-La volonté de Dieu ?

14 février 2021

La volonté de Dieu ?

6° dimanche du Temps Ordinaire – Année B

Lv 13,1-2.45-46 ; Ps 31 (32) ; 1 Co 10,31-11,1 ; Mc 1,40-45

C’est une drôle d’histoire que nous venons d’entendre. Bien sûr dans un premier temps, ça paraît être l’histoire d’une guérison, ce qui est toujours sympathique. Pourtant la conclusion n’est pas si réjouissante que ça pour Jésus. Il est obligé de rester à l’écart dans les endroits déserts. Si ça termine bien pour le lépreux, c’est nettement moins le cas pour le Seigneur. On ne sait pas trop s’il faut admirer le lépreux, sa confiance et son audace, son enthousiasme et son zèle missionnaire, ou bien s’il faut lui reprocher son attitude.

Car sa prière est un peu maladroite : « si tu le veux, tu peux me guérir ». C’est peut-être une manière d’implorer la puissance de Dieu, mais il y a quelque chose de manipulatoire, comme un chantage. Imagine-t-on Jésus répondre, « non je ne le veux pas » ? Je ne suis pas sûr que ce soit très juste de faire reposer la fin de nos souffrances sur l’arbitraire de la volonté de Dieu. Quand on confond la volonté de Dieu et son pouvoir, on prend le risque d’alimenter la suspicion des athées qui prétendent que Dieu n’existe pas puisqu’il y a tant de malheur dans le monde. Admettons que la maladresse de cet homme soit excusable par sa situation : outre les inconvénients de la maladie, il devait – comme nous le rappelle la première lecture – habiter en dehors, prévenir de son état et porter des vêtements déchirés et les cheveux en désordre, ce qui – convenons-en – dépasse les simples gestes barrières que légitimerait la nature contagieuse de son mal. Après tout, nos propres prières sont souvent elles aussi du même ordre. Et puis Jésus lui-même reprend son expression « je le veux, sois purifié ». Alors, il n’y a pas de raison que nous soyons théologiquement plus exigeants que Jésus ! C’est plutôt après que son comportement est suspect, car il désobéit ouvertement à celui qui l’a sauvé. Au lieu de faire ce qu’on lui demande, à savoir de se taire et d’observer ce que prévoyait la Loi pour une purification, il répand partout la nouvelle, déchaînant l’hystérie des foules, au point que Jésus doit se cacher pour entrer dans les villes. Ainsi le Seigneur subit ce dont il a délivré le lépreux !

Voilà qui nous interroge sur notre rapport à la volonté de Dieu. D’abord où recherchons-nous la volonté du Seigneur ? Dans nos sentiments ou dans sa Parole ? En demandant à l’homme d’aller se montrer au prêtre et de donner ce que Moïse a prescrit, Jésus nous montre le lieu où s’exprime avec assurance et certitude la volonté de Dieu. Quand nous nous demandons ce que Dieu veut dans telle et telle circonstance, c’est d’abord dans la Bible qu’il faut rechercher. Mais il ne s’agit pas de l’ouvrir au hasard comme un dictionnaire des oracles. Pour chercher dans la Bible, il faut la connaître, l’habiter. C’est petit-à-petit, à force de la fréquenter que notre cœur se formera selon le cœur de Dieu et que nous pourrons savoir et vouloir ce que Dieu veut.

Ensuite nous pouvons nous demander si nous ne sommes pas plus enclins à suivre la volonté de Dieu quand elle nous arrange. C’est sûr, qu’il est plus facile et plus agréable d’être guéri que d’offrir un sacrifice de purification – d’autant que la cérémonie était assez longue (une semaine) et qu’elle supposait l’offrande de nombreuses choses. Pourtant, il n’est pas juste de trier dans la volonté de Dieu. Quand on obéit seulement quand ça nous plait, on n’est pas dans l’obéissance : c’est toujours notre volonté que l’on suit ! Il ne s’agit pas de chercher à être systématiquement contrarié, mais il faut reconnaître que l’on touche véritablement du doigt que c’est la volonté d’un autre, quand on aurait fait volontiers autrement.

Enfin, plus profondément, se pose la question de l’image que nous avons de la volonté de Dieu. Parfois il nous arrive d’avoir du mal à dire, dans le Notre Père, « que ta volonté soit faite ». C’est que nous imaginons que la volonté du Seigneur pourrait nous être désagréable ! Comment pouvons-nous penser que Dieu voudrait notre malheur ? Saint Paul dans la deuxième lecture nous fournit peut-être la clé pour ne pas avoir peur de la volonté de Dieu : c’est d’agir pour sa gloire. C’est une prière qui revient souvent dans la Bible : « fais-moi voir ta gloire ». La gloire de Dieu n’est pas nécessairement ce que nous rêvions, elle n’est pas toujours ce que nous désirons, mais elle est toujours avec nous et pour nous.

Nous n’avons pas à juger le lépreux, nous n’avons pas non plus à l’admirer ou à l’imiter, mais sa rencontre avec Jésus nous interroge sur notre relation à la volonté du Seigneur. Savons-nous la rechercher là où elle s’exprime ? Savons-nous l’accueillir même quand cela nous demande un effort ? Savons-nous lui faire confiance pour la désirer et l’accomplir dans tous les moments de notre vie ?

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Consolatrice des affligés qu’elle nous apprenne à prier dans la confiance et dans l’humilité. Humble Servante du Seigneur qu’elle nous encourage à rechercher l’union des volontés en donnant autant qu’en recevant. Reine des Cieux qu’elle nous guide sur le chemin qui nous conduit vers celui qui veut nous rassembler au cœur de son cœur, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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