Père Charles Mallard-L’amour, force de la liberté

L’amour, force de la liberté
4° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C
Jr 1,4-5.17-19 ; Ps 70 (71) ; 1 Co 12,31-13,13 ; Lc 4, 21-30
A bien des égards, Jésus manifestait déjà cette force dans la synagogue de Nazareth, non pas face à la fureur de la foule, mais face à un piège beaucoup plus subtil : celui de la compromission et du chantage affectif. Dévoilant les pensées intéressées de ses auditeurs, il les prévient : ce n’est pas parce que vous me connaissez que vous aurez un traitement de faveur : ce n’est pas parce que vous êtes mon village d’origine, que je ferai comme à Capharnaüm ! On peut dire que dans l’évangile, Jésus fait preuve de la souveraine liberté de Dieu qui n’entend se laisser forcer, ni par des privilèges, ni par des menaces. Car on comprend bien que la force du Seigneur n’est pas de l’indifférence, ni de l’arrogance : il montrera tout au long de son ministère qu’il n’est pas insensible à la souffrance et qu’il n’agit pas selon les caprices de ses humeurs. Mais à Nazareth, il nous fait comprendre que la grâce est pure gratuité et que Dieu n’est pas notre obligé.
Et cela peut nous aider à mieux comprendre le magnifique hymne à la charité que nous avons entendu en deuxième lecture. Nous pourrions être tenté d’en rester au plaisir esthétique d’un texte admirablement construit, en oubliant les exigences qu’il implique et la force qu’il révèle. L’amour que décrit saint Paul est loin d’être un sentiment romantique un peu mièvre, c’est au contraire une force et une majesté qui s’enracine dans ce qu’il y a de meilleur pour triompher de ce que la vie peut apporter de mesquin et de désagréable. « L’amour prend patience, ne jalouse pas, ne se vante pas, ne cherche pas son intérêt, ne s’emporte pas ; il supporte tout, espère tout, endure tout ». Si l’amour ne passera jamais, c’est qu’il est fort et il est fort parce qu’il est la liberté de Dieu.
Bien sûr nous sommes invités à vivre cet amour, mais c’est d’abord l’amour de Dieu que décrit l’apôtre. C’est donc en contemplant la manière dont le Seigneur nous aime que nous pourrons comprendre notre manière d’aimer. Sachant qu’il nous est plus facile d’aimer Dieu qui est parfait, tandis que lui nous aime alors que sommes imparfaits ! Ainsi Dieu supporte tout de nous et continue de nous aimer malgré nos péchés, tout supporter est pour lui un acte de miséricorde tandis que c’est pour nous un acte de foi : si nous pouvons tout supporter de Lui c’est parce qu’il sait mieux que nous ce qui est bon. Même si souvent, nous prétendons le contraire. Un peu comme les gens de la synagogue de Nazareth, il nous arrive de penser que le Seigneur devrait nous privilégier, puisque nous sommes baptisés, puisque nous sommes fidèles à ses commandements (au moins à ceux que nous jugeons les plus importants) : nous cherchons notre intérêt dans l’amour pour Dieu, en estimant qu’il a bien de la chance que nous l’aimions !
Contempler Jésus qui passe au milieu de la foule furieuse, pour aller son chemin est un bon moyen de nous rappeler la force de la liberté du Seigneur. Non pas pour rester sur place impuissant à le contraindre ou triste de ce qu’il accorde aux autres ; mais pour le suivre sur ce chemin par excellence et demander le don le plus grand : celui de l’amour qui ne passe pas.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la sagesse, qu’elle nous apprenne à nous laisser instruire par la Parole de Dieu, même quand cela nous dérange ou nous surprend. Tour de David, qu’elle nous soutienne dans les difficultés pour que nous puissions aller sur le Chemin du Seigneur. Mère du Bel Amour qu’elle nous entraîne dans ce don supérieur à tous les autres : la charité qui est notre raison d’être et de vivre, dès maintenant et pour les siècles de siècles.