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Père Charles Mallard-Le souffle de la Parole

6 février 2022

Le souffle de la Parole

5° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Is 6, 1-2a. 3-8 ; Ps 137 ; 1 Co 15,1-11 ; Lc 5,1-11

« En ce temps-là, la foule se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu ». Voilà une image réjouissante, au moins pour ceux qui aiment la parole de Dieu. La foule est curieuse, enthousiaste, et l’on peut se réjouir que grâce à l’enseignement de Jésus tant de personnes éprouvent cette soif de la parole de Dieu, tant de personnes réalisent à quel point elles ont besoin de cette parole … Aujourd’hui ce serait plutôt les spectacles ou la colère qui rassemblent les foules ! Je vous avoue qu’il y a dans cette scène au bord du lac de Génésareth quelque chose qui me fait rêver ! Quelle belle chose ce serait que la parole de Dieu puisse nous mobiliser ainsi ! Même si tous n’étaient pas convaincus, même s’il y avait quelques curieux, peut-être même des indics pour le Temple ou pour Rome, il est bon de contempler cette puissance de la Parole qui amène autour du Seigneur tant de personnes qu’il est obligé de s’éloigner un peu pour se faire entendre de tous. Et déjà nous voilà questionnés : que sommes-nous prêts à faire pour entendre la parole de Dieu ? Avons-nous ce goût de la Parole qui nous amène à la creuser pour la connaître mieux ? Réalisons-nous à quel point la parole est non seulement utile mais nécessaire ?

Dans cette scène, il y a aussi des personnages qui contrastent avec l’excitation de la foule : ce sont les pêcheurs à coté de leurs barques ; ils nettoient leurs filets. Sans doute fatigués et déçus par une nuit de pêche infructueuse. Ils ne sont pas vraiment indifférents, ils ont plutôt le flegme des habitués : Simon avait déjà accueilli le maître dans sa maison. On ne sait pas bien ce qu’ils ont fait dans la barque, lorsque Jésus leur a demandé de s’écarter du rivage. Peut-être ont-ils fini de ranger le matériel, silencieusement, écoutant d’une oreille discrète un enseignement qu’ils savent pouvoir retrouver dans un contexte plus intime. Or voilà que Jésus leur demande d’avancer au large et de jeter les filets pour la pêche. C’est incongru, parce que ce n’est pas le bon moment : on est en plein jour, et les poissons ne sont pas là. Inutile de s’acharner à refaire ce qui ne fonctionne pas ! Mais la parole du Seigneur n’est pas là pour nous conforter, pour nous dire ce que nous savons déjà, pour nous faire faire ce que nous faisons déjà. Alors ils vont obéir, mettre en pratique cette parole, malgré leurs doutes. C’est un bel exemple de foi que nous donne Simon : c’est une étape supplémentaire dans l’accueil de la parole. Il ne suffit pas de s’enthousiasmer ou de s’intéresser, mais il faut aussi obéir ou accomplir. Qu’est-ce que nous faisons à cause de la parole de Dieu ? Savons-nous, même désabusés, lui laisser une chance de nous surprendre ?

On sait ce qui arrive alors : les poissons si nombreux que les filets menacent de se déchirer, et que les deux barques s’enfoncent sous le poids de la pêche. La stupeur qui saisit tous ceux qui sont là. Et Jésus qui dit à Simon « sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras ». Une parole assez obscure. Une figure de style dont la logique nous échappe : les hommes c’est plus compliqué que les poissons ; on voit mal comment passer des poissons aux hommes peut rassurer ceux qui sont débordés par cette pêche miraculeuse ! Mais à ce moment-là ce n’est pas la logique qui compte, c’est ce que la parole révèle du cœur du Seigneur. La parole n’est plus seulement un guide mais une puissance de transformation, une transfiguration qui nous propose de participer à l’œuvre de Dieu. Comme l’appel qui résonne dans le temple de Jérusalem au temps d’Isaïe : « qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? ». Ainsi la vie des pêcheurs de Génésareth est transformée : « laissant tout ils le suivirent ». Et nous ? Avons-nous laissé résonner la parole jusqu’au plus profond de nos cœurs pour qu’elle nous transforme ? Qu’est-ce que la parole de Dieu a bouleversé en nous ?

Dans un autre style, c’est au même mouvement que saint Paul appelle les Corinthiens : se souvenir de l’Évangile, cette Bonne Nouvelle qu’ils ont entendue avec intérêt, qui les soutient pour qu’ils tiennent bon, et qui les a rendus croyants pour qu’ils soient sauvés, c’est-à-dire pour que la grâce de Dieu agisse en eux. Que ce soient eux ou nous c’est la même dynamique que propose la parole de Dieu : creuser en nous le désir de l’entendre, la mettre en pratique malgré nos doutes, lui permettre de nous transformer et de transformer nos vies.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais nous conduise dans ce souffle de la Parole. Etoile du matin, qu’elle nous apprenne à écouter le murmure de la brise légère. Trône de la Sagesse, qu’elle nous encourage à jeter les filets quand le Seigneur le demande. Arche de la Nouvelle Alliance, qu’elle nous aide à laisser ce qui nous encombre, pour suivre le Christ dans le cœur du Père, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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