Père Charles Mallard-Lever les yeux vers le ciel

Lever les yeux vers le ciel
Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie
Ap 11,19. 12, 1-6. 10 ; Ps 44 ; 1 Co 15,20-27a ; Lc 1, 39-56
Ainsi nous sommes invités à lever les yeux vers le ciel pour contempler ce signe grandiose, cette gloire céleste dans laquelle la Mère de Dieu a été élevée corps et âme au terme de sa vie terrestre. Bien évidemment il ne s’agit pas de faire un geste physique : ce sont d’abord les yeux du cœur que nous tournons vers un ciel qui est la présence de Dieu et non pas une partie de l’atmosphère. L’invitation n’en reste pas moins pertinente, tant nous avons tendance à vivre dans un monde horizontal et matérialiste. Rares sont les occasions de nous souvenir que notre vie ne s’arrête pas avec la mort, et que nous sommes destinés à une gloire plus haute et plus durable que le confort du moment, l’estime de nos contemporains ou la mémoire des générations. Dans nos désirs, nos projets ou nos espoirs quelle est la place du ciel ? En cette fête de l’Assomption, cela vaut la peine de vérifier que nous vivons les yeux levés vers le ciel. Saint Paul dans la deuxième lecture nous rappelait le destin permis par la résurrection du Christ … il n’est pas sûr que nous l’ayons toujours aussi présent à l’esprit qu’il le faudrait !
Car l’image qui apparaît dans le ciel n’est pas un beau spectacle aérien ou pyrotechnique, c’est un signe, donc un appel. Il ne s’agit pas de regarder en l’air le temps d’une parenthèse, pour repartir ensuite affronter, tête baissée, les tracas de la vie ordinaire et les contrariétés du temps présent. Si nous levons les yeux vers le ciel, c’est pour nous laisser attirer et nous mettre en route. Marie est déjà ce que nous serons : sa gloire annonce notre gloire ; la célébration de son Assomption n’est pas le doux rêve d’un bonheur inaccessible, mais une promesse et un exemple. « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur ». De toutes les bénédictions d’Élisabeth lors de la Visitation, c’est sans doute celle qui nous est le plus accessible ; et c’est certainement celle que le Seigneur attend de nous. C’est d’ailleurs la béatitude que Jésus reprendra : « heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent ». Paradoxalement, de toutes les fêtes en l’honneur de la Vierge Marie, l’Assomption est peut-être celle qui nous concerne le plus ; et il est significatif que l’évangile du jour nous rappelle le Magnificat, comme une invitation à entrer dans la prière avec Marie.
Enfin, lever les yeux vers le ciel, c’est aussi se retrousser les manches. A vrai dire, le signe de la femme dans l’Apocalypse n’est pas aussi paisible qu’on le retient généralement : « elle est enceinte et crie dans les douleurs et la torture d’un enfantement » disait le texte. Dans la vie spirituelle nous ne sommes jamais purement spectateurs : la contemplation nous engage, l’appel sollicite notre consentement. On ne peut pas louer la miséricorde de Dieu en gardant un cœur dur ; ni affirmer qu’il disperse les superbes et se gonfler d’orgueil ; ou remarquer qu’il renvoie les riches les mains vides et chercher à se goinfrer. L’Assomption est un aboutissement, ce qui veut dire que le ciel déploie ce qui commence sur la terre. Il n’est pas indifférent que Marie entre dans la gloire avec son âme mais aussi avec son corps. Dieu ne prend pas qu’une partie de ce que nous sommes, vérifions qu’il peut assumer ce que nous faisons.
La prière d’ouverture demandait au Seigneur que « nous demeurions attentifs aux choses d’en haut ». Il s’agit bien aujourd’hui de lever les yeux vers le ciel pour garder la perspective de notre vie, pour entendre l’appel à partager la gloire de Dieu, pour convertir nos vies à la mesure de son cœur.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Porte du Ciel qu’elle affermisse notre espérance ; Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle soutienne notre foi ; Mère du Bel Amour qu’elle entraîne notre charité pour que nous puissions porter jusqu’à sa plénitude le Don de Dieu et demeurer en lui comme il demeure en nous dès maintenant et dans les siècles des siècles.