Père Charles Mallard-Eviter les fausses paix

homélie 2

Eviter les fausses paix

17 Août 2025

20° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Jr 38,4-6. 8-10 ; Ps 39 ; He 12,1-4 ; Lc 12,49-53

Je vous avoue que lorsque j’ai lu pour la première fois les textes de ce dimanche, j’ai regretté de ne pas être encore en vacances ce qui m’aurait, peut-être, dispensé de les commenter ! Mais la Parole de Dieu est là, et il ne sert à rien de la fuir, alors essayons de la comprendre.

Même s’il utilise des images apparemment contradictoires comme le feu et le baptême, donc l’eau, on réalise assez facilement que Jésus parle de sa mission. Ce qui est plus difficile c’est son affirmation : « je ne suis pas venu mettre la paix sur la terre » ! Alors que les anges à sa naissance chantent : « paix aux hommes qu’il aime » ; alors que Jésus sur la montagne dit « heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » ; alors qu’au moment de sa passion, il dit à ses disciples : « je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix » … comment peut-il dire qu’il ne vient pas mettre la paix sur la terre ? La seule explication respectueuse, c’est que dans l’évangile d’aujourd’hui, il nous met en garde contre une fausse paix, ou du moins contre un type de paix qui n’est pas celle qu’il nous propose. Voyons comment les autres textes peuvent nous éclairer.

Dans la première lecture, il est reproché à Jérémie de « démoraliser le peuple ». Pour comprendre le contexte, il faut se rappeler qu’on est pendant le siège de Jérusalem en 588. Alors que les princes veulent résister à tout prix, comptant sur l’aide de Pharaon, la parole de Dieu adressée à Jérémie dit que Jérusalem sera détruite et qu’il est temps de se rendre avant qu’il ne soit trop tard. La situation est délicate, certes. Mais est-ce qu’on éteint la parole de Dieu en tuant son messager ? A la limite, on pourrait comprendre que l’on accuse Jérémie de mentir, mais ici l’accusation est de ne pas soutenir le discours officiel. La grande erreur des princes est de considérer la parole de Dieu comme un instrument au service de leur politique. Ils veulent une unanimité avec eux. Voilà la première fausse paix : celle qu’on impose, celle dont on veut qu’elle serve nos idées. Non, le Christ n’est pas venu pour imposer une paix menaçante, la paix de Dieu ne se construit pas en étouffant la contestation. Et c’est heureux, d’ailleurs, parce que l’histoire prouve que cette paix tyrannique est fragile et ne dure pas longtemps.

Ensuite nous avons entendu la lettre aux Hébreux. Manifestement elle s’adresse à des chrétiens qui sont dans l’épreuve, et elle les encourage à résister. On peut penser aux persécutions qui n’ont pas tardé à s’abattre sur les chrétiens, mais le texte parle surtout du péché sans préciser s’il s’agit du notre ou de celui des persécuteurs. Quoiqu’il en soit, en invitant à suivre l’exemple du Christ, l’auteur dénonce une deuxième fausse paix : celle de la facilité, celle qu’on confond avec la tranquillité en se construisant une bulle d’indifférence pour s’épargner tout effort. Non, le Christ n’est pas venu proposer une paix fataliste, la paix de Dieu ne se construit pas en se laissant porter par les événements et en acceptant tout et n’importe quoi. La paix sans exigence n’est qu’une compromission, elle n’est jamais satisfaisante.

Et cela peut éclairer alors la dernière partie de l’évangile, l’histoire des divisions dans les familles. On laissera aux psychologues de bazar le soin de gloser sur les exemples, mais on comprend bien qu’il ne s’agit pas d’encourager les divisions ; Jésus fait plutôt le constat de ce qui n’a pas manqué d’arriver : la foi étant une liberté, il arrive qu’au sein d’une même famille certains l’adoptent quand d’autres la refusent. Ça n’est pas obligé, et tant mieux si ça n’arrive pas. C’est triste et douloureux et ce qui peut pacifier les relations familiales est à encourager, mais pas à n’importe quel prix. C’est la troisième fausse paix : celle du renoncement qui est en quelque sorte le cumul des deux précédentes puisqu’en renonçant à la foi, on cède à une concorde facile et on capitule devant ce qu’on nous impose. Suivre le Christ est exigeant, comme il ne s’impose pas, il y aura toujours des gens pour s’y opposer, mais ce n’est pas en cherchant la paix qu’on obtient le salut, c’est en accueillant le salut qu’on entre dans la paix qui ne sera jamais complète tant qu’on ne sera pas dans le Royaume de Dieu.

On aurait donc tort de croire que l’évangile est un encouragement à faire la guerre et à multiplier les conflits, le Seigneur nous avertit seulement de ne pas nous faire des illusions en recherchant ou en acceptant les fausses paix, celle qui s’impose, celle qui paraît facile, celle qui demande de renoncer à le suivre.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse qu’elle nous apprenne à suivre le Christ plutôt que la loi du nombre ou de la force. Secours des Chrétiens qu’elle nous fortifie dans les épreuves pour que nous ne cédions pas à la facilité. Reine de la Paix qu’elle nous conduise jusque dans le cœur du Père pour que nous demeurions en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

Publié le 04 juin 2025

Père Charles Mallard-Eviter les fausses paix

Eviter les fausses paix

17 Août 2025

20° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Jr 38,4-6. 8-10 ; Ps 39 ; He 12,1-4 ; Lc 12,49-53

Je vous avoue que lorsque j’ai lu pour la première fois les textes de ce dimanche, j’ai regretté de ne pas être encore en vacances ce qui m’aurait, peut-être, dispensé de les commenter ! Mais la Parole de Dieu est là, et il ne sert à rien de la fuir, alors essayons de la comprendre.

Même s’il utilise des images apparemment contradictoires comme le feu et le baptême, donc l’eau, on réalise assez facilement que Jésus parle de sa mission. Ce qui est plus difficile c’est son affirmation : « je ne suis pas venu mettre la paix sur la terre » ! Alors que les anges à sa naissance chantent : « paix aux hommes qu’il aime » ; alors que Jésus sur la montagne dit « heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » ; alors qu’au moment de sa passion, il dit à ses disciples : « je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix » … comment peut-il dire qu’il ne vient pas mettre la paix sur la terre ? La seule explication respectueuse, c’est que dans l’évangile d’aujourd’hui, il nous met en garde contre une fausse paix, ou du moins contre un type de paix qui n’est pas celle qu’il nous propose. Voyons comment les autres textes peuvent nous éclairer.

Dans la première lecture, il est reproché à Jérémie de « démoraliser le peuple ». Pour comprendre le contexte, il faut se rappeler qu’on est pendant le siège de Jérusalem en 588. Alors que les princes veulent résister à tout prix, comptant sur l’aide de Pharaon, la parole de Dieu adressée à Jérémie dit que Jérusalem sera détruite et qu’il est temps de se rendre avant qu’il ne soit trop tard. La situation est délicate, certes. Mais est-ce qu’on éteint la parole de Dieu en tuant son messager ? A la limite, on pourrait comprendre que l’on accuse Jérémie de mentir, mais ici l’accusation est de ne pas soutenir le discours officiel. La grande erreur des princes est de considérer la parole de Dieu comme un instrument au service de leur politique. Ils veulent une unanimité avec eux. Voilà la première fausse paix : celle qu’on impose, celle dont on veut qu’elle serve nos idées. Non, le Christ n’est pas venu pour imposer une paix menaçante, la paix de Dieu ne se construit pas en étouffant la contestation. Et c’est heureux, d’ailleurs, parce que l’histoire prouve que cette paix tyrannique est fragile et ne dure pas longtemps.

Ensuite nous avons entendu la lettre aux Hébreux. Manifestement elle s’adresse à des chrétiens qui sont dans l’épreuve, et elle les encourage à résister. On peut penser aux persécutions qui n’ont pas tardé à s’abattre sur les chrétiens, mais le texte parle surtout du péché sans préciser s’il s’agit du notre ou de celui des persécuteurs. Quoiqu’il en soit, en invitant à suivre l’exemple du Christ, l’auteur dénonce une deuxième fausse paix : celle de la facilité, celle qu’on confond avec la tranquillité en se construisant une bulle d’indifférence pour s’épargner tout effort. Non, le Christ n’est pas venu proposer une paix fataliste, la paix de Dieu ne se construit pas en se laissant porter par les événements et en acceptant tout et n’importe quoi. La paix sans exigence n’est qu’une compromission, elle n’est jamais satisfaisante.

Et cela peut éclairer alors la dernière partie de l’évangile, l’histoire des divisions dans les familles. On laissera aux psychologues de bazar le soin de gloser sur les exemples, mais on comprend bien qu’il ne s’agit pas d’encourager les divisions ; Jésus fait plutôt le constat de ce qui n’a pas manqué d’arriver : la foi étant une liberté, il arrive qu’au sein d’une même famille certains l’adoptent quand d’autres la refusent. Ça n’est pas obligé, et tant mieux si ça n’arrive pas. C’est triste et douloureux et ce qui peut pacifier les relations familiales est à encourager, mais pas à n’importe quel prix. C’est la troisième fausse paix : celle du renoncement qui est en quelque sorte le cumul des deux précédentes puisqu’en renonçant à la foi, on cède à une concorde facile et on capitule devant ce qu’on nous impose. Suivre le Christ est exigeant, comme il ne s’impose pas, il y aura toujours des gens pour s’y opposer, mais ce n’est pas en cherchant la paix qu’on obtient le salut, c’est en accueillant le salut qu’on entre dans la paix qui ne sera jamais complète tant qu’on ne sera pas dans le Royaume de Dieu.

On aurait donc tort de croire que l’évangile est un encouragement à faire la guerre et à multiplier les conflits, le Seigneur nous avertit seulement de ne pas nous faire des illusions en recherchant ou en acceptant les fausses paix, celle qui s’impose, celle qui paraît facile, celle qui demande de renoncer à le suivre.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse qu’elle nous apprenne à suivre le Christ plutôt que la loi du nombre ou de la force. Secours des Chrétiens qu’elle nous fortifie dans les épreuves pour que nous ne cédions pas à la facilité. Reine de la Paix qu’elle nous conduise jusque dans le cœur du Père pour que nous demeurions en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

Publié le 04 juin 2025

Père Charles Mallard-Eviter les fausses paix

homélie 2

Eviter les fausses paix

17 Août 2025

20° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Jr 38,4-6. 8-10 ; Ps 39 ; He 12,1-4 ; Lc 12,49-53

Je vous avoue que lorsque j’ai lu pour la première fois les textes de ce dimanche, j’ai regretté de ne pas être encore en vacances ce qui m’aurait, peut-être, dispensé de les commenter ! Mais la Parole de Dieu est là, et il ne sert à rien de la fuir, alors essayons de la comprendre.

Même s’il utilise des images apparemment contradictoires comme le feu et le baptême, donc l’eau, on réalise assez facilement que Jésus parle de sa mission. Ce qui est plus difficile c’est son affirmation : « je ne suis pas venu mettre la paix sur la terre » ! Alors que les anges à sa naissance chantent : « paix aux hommes qu’il aime » ; alors que Jésus sur la montagne dit « heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » ; alors qu’au moment de sa passion, il dit à ses disciples : « je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix » … comment peut-il dire qu’il ne vient pas mettre la paix sur la terre ? La seule explication respectueuse, c’est que dans l’évangile d’aujourd’hui, il nous met en garde contre une fausse paix, ou du moins contre un type de paix qui n’est pas celle qu’il nous propose. Voyons comment les autres textes peuvent nous éclairer.

Dans la première lecture, il est reproché à Jérémie de « démoraliser le peuple ». Pour comprendre le contexte, il faut se rappeler qu’on est pendant le siège de Jérusalem en 588. Alors que les princes veulent résister à tout prix, comptant sur l’aide de Pharaon, la parole de Dieu adressée à Jérémie dit que Jérusalem sera détruite et qu’il est temps de se rendre avant qu’il ne soit trop tard. La situation est délicate, certes. Mais est-ce qu’on éteint la parole de Dieu en tuant son messager ? A la limite, on pourrait comprendre que l’on accuse Jérémie de mentir, mais ici l’accusation est de ne pas soutenir le discours officiel. La grande erreur des princes est de considérer la parole de Dieu comme un instrument au service de leur politique. Ils veulent une unanimité avec eux. Voilà la première fausse paix : celle qu’on impose, celle dont on veut qu’elle serve nos idées. Non, le Christ n’est pas venu pour imposer une paix menaçante, la paix de Dieu ne se construit pas en étouffant la contestation. Et c’est heureux, d’ailleurs, parce que l’histoire prouve que cette paix tyrannique est fragile et ne dure pas longtemps.

Ensuite nous avons entendu la lettre aux Hébreux. Manifestement elle s’adresse à des chrétiens qui sont dans l’épreuve, et elle les encourage à résister. On peut penser aux persécutions qui n’ont pas tardé à s’abattre sur les chrétiens, mais le texte parle surtout du péché sans préciser s’il s’agit du notre ou de celui des persécuteurs. Quoiqu’il en soit, en invitant à suivre l’exemple du Christ, l’auteur dénonce une deuxième fausse paix : celle de la facilité, celle qu’on confond avec la tranquillité en se construisant une bulle d’indifférence pour s’épargner tout effort. Non, le Christ n’est pas venu proposer une paix fataliste, la paix de Dieu ne se construit pas en se laissant porter par les événements et en acceptant tout et n’importe quoi. La paix sans exigence n’est qu’une compromission, elle n’est jamais satisfaisante.

Et cela peut éclairer alors la dernière partie de l’évangile, l’histoire des divisions dans les familles. On laissera aux psychologues de bazar le soin de gloser sur les exemples, mais on comprend bien qu’il ne s’agit pas d’encourager les divisions ; Jésus fait plutôt le constat de ce qui n’a pas manqué d’arriver : la foi étant une liberté, il arrive qu’au sein d’une même famille certains l’adoptent quand d’autres la refusent. Ça n’est pas obligé, et tant mieux si ça n’arrive pas. C’est triste et douloureux et ce qui peut pacifier les relations familiales est à encourager, mais pas à n’importe quel prix. C’est la troisième fausse paix : celle du renoncement qui est en quelque sorte le cumul des deux précédentes puisqu’en renonçant à la foi, on cède à une concorde facile et on capitule devant ce qu’on nous impose. Suivre le Christ est exigeant, comme il ne s’impose pas, il y aura toujours des gens pour s’y opposer, mais ce n’est pas en cherchant la paix qu’on obtient le salut, c’est en accueillant le salut qu’on entre dans la paix qui ne sera jamais complète tant qu’on ne sera pas dans le Royaume de Dieu.

On aurait donc tort de croire que l’évangile est un encouragement à faire la guerre et à multiplier les conflits, le Seigneur nous avertit seulement de ne pas nous faire des illusions en recherchant ou en acceptant les fausses paix, celle qui s’impose, celle qui paraît facile, celle qui demande de renoncer à le suivre.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse qu’elle nous apprenne à suivre le Christ plutôt que la loi du nombre ou de la force. Secours des Chrétiens qu’elle nous fortifie dans les épreuves pour que nous ne cédions pas à la facilité. Reine de la Paix qu’elle nous conduise jusque dans le cœur du Père pour que nous demeurions en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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Publié le 04 juin 2025