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Père Charles Mallard-Pensée des hommes ou pensée de Dieu

3 septembre 2023

Pensée des hommes ou pensée de Dieu

22° Dimanche du Temps Ordinaire – Année A

Jr 20,7-9 ; Ps 62 (63) ; Rm 12,1-2 ; Mt 16, 21-27

« Ne prenez pas pour modèle le monde présent ». L’exhortation de saint Paul aux Romains résonne du reproche de Jésus à saint Pierre : « tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ». Et c’est une parole qu’il est bon d’entendre et de méditer.

Peut-être y a-t-il des époques plus que d’autres où la différence entre les pensées de Dieu et les pensées des hommes est plus évidente voire plus douloureuse. Pourtant cela a toujours été vrai, et c’est un défi constant du chrétien que d’accepter de ne pas faire ou penser comme tout le monde mais de chercher d’abord à discerner la volonté de Dieu. Ce qui doit nous guider dans notre vie, c’est d’abord ce qui est capable de plaire au Seigneur, et cela implique souvent d’aller à contre-courant des habitudes ou des opinions communes. La première conséquence, c’est cette sourde incompréhension du monde qui vaut parfois des moqueries ou des injures, à l’image de ce dont témoignait Jérémie dans la première lecture. Certes c’est désagréable et contrariant d’être humilié ou méprisé, mais le Christ en croix nous rappelle que la fidélité à Dieu est préférable à la considération des foules. Attention toutefois à ne pas inverser les choses : ce n’est pas parce qu’on est humilié qu’on est fidèle à l’évangile, c’est parce qu’on est fidèle à l’évangile que l’on risque d’être humilié. La victime n’a pas toujours raison ce qui compte ce n’est ni d’être honnis ni d’être populaire, c’est d’être fidèle à la Parole de Dieu.

La deuxième conséquence, c’est que dans l’église la réforme n’est pas tant faite pour s’adapter au monde que pour revenir à l’évangile. Pourquoi revenir ? Parce qu’avec le temps il arrive que l’on confonde la foi chrétienne avec les habitudes d’une époque, et ce qui était légitime dans une situation devient incongru dans une autre. Lorsque l’on confond fidélité et immobilisme, on ne suit plus la volonté de Dieu mais le modèle du monde passé ! Celui qui ne veut pas quitter les vêtements de son enfance ne fait pas preuve de fidélité mais de ridicule. Voilà pourquoi, régulièrement, il faut vérifier la fidélité à la Parole de Dieu : ni les idées ou les habitudes d’aujourd’hui ni les idées ou les habitudes d’autrefois ne sont de bons guides pour discerner ce qui est la volonté de Dieu. On ne progresse pas en regardant le monde pour s’y adapter, mais en fixant la Parole de Dieu pour s’y conformer.

C’est que les pensées des hommes ne sont pas seulement celles des autres mais aussi les nôtres ! Pierre en fait l’amère expérience lorsqu’il prétend dicter à Jésus les modalités de sa mission. Et c’est le plus grand défi spirituel que d’accueillir la parole de Dieu lorsqu’elle nous déconcerte ou qu’elle nous contrarie. Même Jérémie connait cette situation : ta parole, dit-il, « était enfermée dans mes os, je m’épuisais à la maitriser sans y réussir ». On ne doit pas chercher dans la parole de Dieu la confirmation de nos opinions mais la lumière qui dévoile ce qui nous appelle, même si cela nous dérange. C’est une belle expérience que de méditer un texte biblique qui nous ravit et nous console, mais le moment où nous réalisons que c’est la parole de Dieu et non pas la parole des hommes, c’est quand un enseignement nous gratte et nous agace. Dans l’Apocalypse, l’ange donne au narrateur un livre qui est doux comme le miel dans la bouche mais amer aux entrailles. C’est une bonne image de la Parole de Dieu qui est à la fois consolante et stimulante. Et si la Parole est à la fois consolante et stimulante, ce n’est pas seulement parce que nous ne sommes pas Dieu, mais parce qu’elle nous entraîne dans le cœur de Dieu qui est l’amour qui donne et se donne et nous invite à perdre pour trouver.

En ce début d’année pastorale, laissons résonner en nous les textes que nous venons d’entendre. Ils nous invitent à nous attacher à la Parole de Dieu plutôt qu’aux pensées des hommes, sans craindre les incompréhensions, sans suivre le modèle du monde de quelque époque que ce soit, sans prendre la volonté de Dieu à notre service, mais en nous laissant prendre par elle pour la servir.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Consolatrice des affligés, qu’elle nous fortifie dans la fidélité à l’appel du Seigneur pour que nous ne nous laissions pas décourager par les difficultés du monde présent. Secours des chrétiens, qu’elle nous guide dans le discernement de la volonté de Dieu pour que nous recherchions ce qui est capable de lui plaire. Refuge des pécheurs, qu’elle nous rende disponibles aux pensées de Dieu, pour que nous puissions renoncer à nous-même et le suivre jusqu’à la croix pour l’accueillir dans la gloire, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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