Père Charles Mallard-Réjouir le Seigneur
Réjouir le Seigneur
3° Dimanche de l’Avent – Année C
So 3,14-18a ; Is 12 ; Ph 4,4-7 ; Lc 3,10-18
Traditionnellement, pendant les temps de conversion, il y a toujours un moment plus doux, un moment qui rappelle la joie au cœur de la démarche. Pendant le carême c’est le 4ème dimanche, pendant l’Avent c’est le 3ème dimanche, c’est-à-dire aujourd’hui. Ainsi le prêtre revêt des ornements roses, pour adoucir l’austérité du violet et inviter à la joie pendant la préparation de la venue du Seigneur.
Et spontanément on pense que nous devons être joyeux de préparer les chemins du Seigneur ; que la conversion doit être joyeuse, et que la pénitence, quelque rude qu’elle soit, doit être faite dans la joie. On pense que la joie à laquelle nous invite ce dimanche est notre joie. Le prophète Sophonie ne disait-il pas : « Pousse des cris de joie » ? Saint Paul n’insistait-il pas : « soyez toujours dans la joie » ? Et c’est vrai que si la tristesse est le fruit du péché, la joie est le signe de la présence de Dieu. Il est donc juste et bon d’être dans la joie. Mais en regardant d’un peu plus près les textes, nous découvrons qu’ils nous disent aussi autre chose : « Le Seigneur ton Dieu […] aura en toi sa joie et son allégresse » ; alors quand saint Paul parle de « la joie du Seigneur », cela peut vouloir dire la joie qui vient du Seigneur, mais cela peut aussi vouloir dire la joie qu’éprouve le Seigneur. Et si la joie de ce dimanche était la joie que le Seigneur ressent à cause de nous ? Et si la conversion à laquelle nous sommes invités était de réjouir le Seigneur ?
Nous pouvons réjouir le Seigneur en agissant d’une manière qui lui plaise. C’est d’ailleurs le chemin qu’indique l’évangile à travers les conseils que Jean-Baptiste donne à ceux qui viennent le trouver : partager et être juste. N’est-ce pas ce qui réjouit le Seigneur ? Faire ce qui plait à Dieu voilà un bon guide pour notre conversion, voilà un bon signe de notre présence à Dieu. Si nous prenons conscience de la présence du Seigneur à nos côtés, si nous réalisons que le Seigneur s’intéresse à ce que nous faisons, pourquoi ne pas s’interroger sur le regard qu’il porte sur nous ? Allons-nous l’ignorer, faire ce qui nous arrange au risque de l’attrister, ou bien au contraire allons-nous nous efforcer de lui faire plaisir, de découvrir cette réalité bouleversante que nous pouvons réjouir le Seigneur ? C’est une première manière d’être dans la joie du Seigneur : faire ce qui lui plait.
Mais la joie n’est pas seulement le fruit de ce que l’on fait, elle est aussi la conséquence d’une relation de qualité. Quand on aime quelqu’un, on éprouve de la joie à le rencontrer, à être avec lui, même s’il ne fait rien de particulier. C’est une deuxième manière de réjouir le Seigneur : être ce qui lui plait. En réalisant que Dieu se réjouit de ce que nous sommes, nous pouvons pressentir tout l’amour qu’il nous porte … Si le temps de l’Avent nous invite à faire ce qui remplit de joie le Seigneur, il nous invite aussi à prendre le temps de goûter son amour, à découvrir le sourire de Dieu quand nous nous tournons vers lui, quand nous sommes présents à sa présence. Même si parfois nous avons du mal à nous supporter, il faut se rendre compte que Dieu se réjouit de ce que nous sommes ! Non pas pour nous gonfler d’orgueil, mais pour plonger dans la confiance, pour grandir dans l’amour qui répond à son amour. C’est une deuxième manière d’être dans la joie du Seigneur : être ce qui lui plait.
Il y a encore une troisième manière. Peut-être avez-vous déjà fait l’expérience d’aimer quelqu’un mais de vous dire « ça je ne peux pas le lui demander ». Si l’on accepte les limites de l’autre, dans cette réflexion il y a quand même une pointe de tristesse. C’est là que nous découvrons que la joie ne concerne pas que le passé ou le présent, mais aussi le futur. On peut donc réjouir le Seigneur non seulement par ce que l’on fait ou ce que l’on est, mais aussi par ce que l’on permet. J’aime imaginer la joie de Dieu qui regarde Marie grandir à Nazareth, et qui se dit : « voilà celle qui va me permettre de naître parmi les hommes ». C’est un troisième axe de conversion : est-ce que nous permettons ce qui plait au Seigneur ? Qu’est-ce qu’il peut nous demander ? Est-ce que nous sommes prêts à lui accorder ce qui le réjouit ?
Oui le dimanche de la joie n’est pas seulement le dimanche de notre joie, mais celui de la joie du Seigneur, le dimanche qui nous invite à réjouir le Seigneur. Rechercher la joie du Seigneur, ce n’est pas seulement un exercice psychologique pour se réjouir de ce qui vient de Dieu, mais c’est surtout une preuve de notre amour, une délicatesse de notre cœur pour découvrir cette réalité inouïe : le Seigneur aura en nous sa joie et son allégresse. N’est-ce pas ce que nous voulons faire, ce que nous voulons être et ce que nous voulons permettre ?
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Trône de la Sagesse, qu’elle nous apprenne à agir selon le cœur de Dieu pour que nos actions puissent lui plaire. Miroir de la Sainteté de Dieu, qu’elle nous façonne à la ressemblance du Seigneur pour que nous soyons toujours plus fidèles à l’image de notre créateur. Rose mystique, qu’elle nous rende disponibles à l’Esprit Saint, pour que nous puissions permettre que s’épanouisse en nous la sainteté à laquelle nous sommes appelés et qu’ainsi nous découvrions la joie de réjouir Celui qui nous attend dès maintenant et pour les siècles des siècles.