Père Charles Mallard-Un carême d’espérance

Un carême d’espérance
Mercredi des cendres
Jl 2,12-18 ; Ps 50 ; 2 Co 5,20-6,2 ; Mt 6,1-6.16-18
Aujourd’hui retentit l’appel de l’apôtre : « au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu ». Un appel qui fait écho de la parole confiée au prophète Joël : « revenez à moi de tout votre cœur ». Une parole qui va résonner pendant quarante jours pour faire de ce temps de carême un chemin de conversion, un temps favorable pour se rapprocher du Seigneur. En cette année jubilaire, c’est une occasion privilégiée pour avancer dans l’espérance.
Le carême en effet n’est pas d’abord un exercice religieux, une case à cocher pour être un bon chrétien. C’est d’abord un temps favorable, un moment de grâce pour progresser dans notre relation à Dieu. Cette année il nous est proposé d’approfondir l’espérance. L’espérance, c’est un peu le moment où l’on regarde la carte pour se dire : « c’est là que je veux aller ». Le carême n’est-il pas le moment privilégié pour s’arrêter, pour faire le point, pour regarder non seulement le chemin parcouru mais surtout le chemin à parcourir. Les moyens habituels du carême sont ceux dont parle Jésus dans l’évangile : l’aumône, la prière et le jeûne.
La prière c’est être attentif au Père qui est présent dans le secret. C’est prendre le temps de le rejoindre, de le contempler, de l’écouter, de se laisser attirer par lui. La prière est la porte de l’espérance : elle nous montre le but de notre vie, elle nous apprend à être avec celui qui nous attend pour l’éternité. Sans la prière, l’espérance est un projet plus ou moins solide, plus ou moins précis. Prier, c’est lever les yeux vers le ciel pour que l’horizon de notre vie ne soit pas seulement la terre, les échéances prévisibles ou l’inexorable cruauté du temps. Sans la prière, nous prenons le risque d’avancer sans savoir où l’on va. Ça peut être distrayant dans une promenade, mais c’est le meilleur moyen de se perdre.
Le jeûne c’est un effort de purification. Cela peut-être de supprimer un repas, mais cela peut-être aussi de se priver de quelque chose qui nous semble essentiel et qui ne l’est pas. L’important n’est pas de se mettre en danger ou d’être abattu, mais de vérifier que nous avons vraiment besoin de ce que nous avons. Faire un effort de privation, c’est faire l’expérience que le manque nous stimule et que le désir conduit plus loin que le plaisir. Renoncer aux satisfactions immédiates, c’est apprendre la dynamique de l’espérance. Si nous avons tout, que pouvons-nous espérer ? Si nous n’avons besoin de rien, qu’est-ce que nous pouvons attendre du Seigneur ? Le jeûne éduque notre volonté pour rechercher ce qu’il nous faut plutôt que ce que nous avons.
L’aumône ou le partage c’est la trace de l’amour dans notre vie. Non pas l’amour qui prend, mais l’amour qui donne, celui qui est de Dieu et qui est Dieu. La générosité est le signe de l’espérance. D’abord parce qu’elle permet d’ouvrir à d’autres l’espoir d’un monde meilleur. Mais aussi parce qu’elle réalise ce que nous attendons. L’espérance pourrait n’être qu’une idée, on lui a même reproché parfois d’être une illusion. Mais le partage nous fait participer dès maintenant à la vie divine quand la main gauche ignore ce que fait la main droite, quand ce qui est donné, est donné pour servir à l’autre et non pas pour nous faire valoir, quand l’autre nous devient ainsi plus important que nous-mêmes.
« Voici maintenant le moment favorable, voici maintenant le jour du salut ». Convertissons-nous et faisons confiance à l’évangile : le Seigneur attend que nous le rejoignions dans la prière ; lâchons ce à quoi nous nous agrippons pour accueillir le don de Dieu ; ouvrons nos cœurs aux dimensions du cœur de Dieu. Mettons-nous en marche pour être pèlerins d’espérance