Père Charles Mallard-Heureux les invités au repas du Seigneur ?
Heureux les invités au repas du Seigneur ?
32° Dimanche du Temps Ordinaire – Année A
Sg 6,12-16 ; Ps 62 ; 1 Th 4,13-18 ; Mt 25,1-13
« Le Royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces » … Le début de la parabole ressemble à ce que nous entendons dans la liturgie, avant la communion : « Heureux les invités aux noces de l’Agneau ». Mais le début de l’histoire a beau être similaire, la suite apporte quelques nuances : si tout se passe bien pour certaines, pour d’autres l’heureuse invitation tourne au cauchemar. Évidemment, Jésus nous raconte cette histoire pour nous prévenir et nous avertir, pour que nous ne vivions pas une semblable mésaventure. Voyons donc ce à quoi il faut veiller pour éviter de nous retrouver comme celles qui finissent enfermées à l’extérieur des noces.
Tout d’abord, il y a une condition à l’invitation. Les jeunes filles ne sont pas seulement invitées, elles ont un rôle à jouer, et pour cela elles doivent venir avec une lampe. Elles n’arrivent pas les mains vides, ni même avec un cadeau : on a besoin d’elles pour éclairer la scène. « Vous êtes la lumière du monde » disait Jésus dans le discours sur la montagne. Cela suppose bien sûr que la lampe soit allumée … sinon elle est inutile ! Et c’est pour cela que celles dont les lampes s’éteignent s’inquiètent : elles deviennent inutiles. Voilà déjà un premier sujet de méditation : on n’entre pas dans le Royaume des Cieux par hasard, ou par convention parce qu’on figure dans le carnet d’adresse de l’époux. Le Royaume des Cieux a besoin de nous. Le Seigneur compte sur nous. On n’est pas des figurants ni des spectateurs mais des acteurs aux noces de l’Agneau. Il faut donc certaines dispositions. Pour reprendre l’image de la lumière, nous savons que c’est le Seigneur lui-même qui nous donne et nous transmets la lumière … Les dispositions à prendre pour accueillir l’invitation ne sont pas exagérées, mais il faut les prendre.
La suite de l’histoire montre d’ailleurs que ces dispositions supposent une certaine vigilance. L’époux tarde à venir, et toutes s’endorment. Lorsqu’enfin on annonce sa venue, certaines se trouvent embarrassées puisque leurs lampes s’éteignent. Il ne suffit donc pas de se préparer ponctuellement aux noces, il faut encore durer. C’est une dimension importante, c’est même le cœur du message de Jésus : « veillez car vous ne savez ni le jour ni l’heure ». A la mission qu’implique l’invitation aux noces, s’ajoute une qualité : celle de la persévérance. C’est ainsi qu’apparaît le deuxième sujet de méditation : l’importance de la fidélité. Dans un monde où l’on est plus sensibles aux changements qu’aux permanences, où l’on valorise l’émotion donc la réaction instantanée, nous devons être vigilants à garder cette qualité de persévérance, cette fidélité que Jésus nous désigne comme indispensable à l’entrée dans le Royaume. Ne désigne-t-on pas les chrétiens comme « les fidèles » ?
Reste un détail intrigant dans la parabole : les jeunes filles qui avaient de l’huile en réserve, ne partagent pas avec celles qui en manquent. Cela pourrait paraître choquant : le partage n’est-il pas une valeur de notre foi ? Cela vaut la peine d’entendre ce qu’elles disent pour expliquer leur attitude : « jamais cela ne suffira pour nous et pour vous ». Ainsi ce n’est pas tant qu’elles ne veulent pas, mais elles ne peuvent pas. Il y a des choses qu’on peut partager, et d’autres choses qu’on ne peut pas partager. Il y a des choses pour lesquelles on peut se faire aider, et d’autres que nous sommes les seuls à pouvoir faire. Par exemple, personne ne peut manger à notre place, ou personne ne peut se laver à notre place ! Rappelons-nous : il s’agissait d’aller à la rencontre de l’époux : peut-on rencontrer vraiment quelqu’un par procuration ? Il y a d’autres enseignements de Jésus sur le partage, mais cette parabole est là pour nous prévenir que l’entrée dans le Royaume ne se délègue pas. Il y a un point dans la relation à Dieu où nous sommes en première ligne et qui nous implique personnellement.
Nous qui sommes « invités aux noces de l’Agneau », entendrons-nous l’avertissement de Jésus dans la parabole des dix jeunes filles ? Sans doute le Royaume des Cieux évoqué par le Seigneur désigne-t-il d’abord les derniers temps. Mais ne nous faisons pas illusion : c’est déjà maintenant, dans notre vie spirituelle que nous devons veiller à être dans les dispositions que Dieu attend de nous pour être acteurs et non pas spectateurs ; c’est déjà maintenant que nous devons nous exercer à la persévérance et vivre la fidélité ; c’est déjà maintenant que nous devons assumer ce que personne ne peut faire à notre place.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Etoile du matin, qu’elle nous apprenne à répondre à l’appel du Seigneur, en nous disposant à ce qu’il nous demande. Secours des Chrétiens, qu’elle nous soutienne dans la persévérance pour que nous restions fidèles à ce que nous avons reçu. Rose mystique, qu’elle nous encourage à déployer le Don de Dieu, pour que nous puissions vivre la rencontre à la première personne, et demeurer en Lui comme Il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.