Père Charles Mallard-La dynamique de la foi
27 août 2023
La dynamique de la foi
21° dimanche du Temps Ordinaire – Année A
Is 22, 19-23 ; Ps 137 (138) ; Rm 11,33-36 ; Mt 16,13-20
La scène que nous rapporte l’évangile d’aujourd’hui est bien connue. Elle a suscité d’innombrables commentaires entre les différentes sensibilités chrétiennes pour savoir si elle fondait le rôle et la mission du Pape comme successeur de Pierre. Mais elle est surtout importante parce qu’elle illustre de manière remarquable la dynamique de la foi.
Tout d’abord il y a le dialogue entre Jésus et ses disciples. Le Seigneur pose deux questions : « au dire des gens, qui est le Fils de l’Homme ? » puis « et vous, que dites-vous ? pour vous qui suis-je ? ». La première question est un sondage, la deuxième une interpellation. A la première question les disciples ne font que rapporter l’opinion de la foule, la deuxième question les engage. C’est ainsi que nous pouvons comprendre la différence entre la foi et l’opinion que l’on confond trop souvent. La foi n’est pas une option comme une autre dans l’éventail des réponses possibles, elle n’est pas l’opinion de la majorité interrogée, elle implique personnellement celui qui répond et surtout elle qualifie. Toutes les opinions sont possibles, certaines sont respectables, mais seule la réponse de Pierre à la question de Jésus est la foi chrétienne. Est-ce que ça signifie qu’il comprend parfaitement ce qu’il dit ? Sans doute non, la suite des événements montrera qu’il ne réalise pas très bien ce que c’est qu’être le Christ, le Fils du Dieu vivant, et Jésus remarque « ce n’est pas la chair et le sang » qui ont conduit sa réponse, c’est-à-dire que ça n’est pas l’observation ou la réflexion qui ont guidé sa réponse. Dans une relation, les mots peuvent rester les mêmes, mais le sens peut évoluer et s’approfondir. Ainsi dans la foi on comprend petit à petit les mots que nous prononçons. Il n’en reste pas moins que la foi chrétienne est une position précise vis-à-vis de la personne de Jésus.
Ensuite, après que Pierre ait répondu, Jésus le complimente et le bénit : « Heureux es-tu », et il souligne « c’est mon Père qui est aux cieux qui t’a révélé cela ». Ainsi la foi nait-elle d’une révélation, d’une inspiration divine. On dit qu’il s’agit d’un don de Dieu. Mais comprenons bien. Ce n’est pas parce que Dieu donne que l’homme reçoit, ou plutôt, ce n’est pas parce que l’homme n’a pas reçu, que Dieu n’a pas proposé ! Il arrive qu’on ne demande pas ; il arrive aussi qu’on ne veuille pas recevoir parce qu’on attend autre chose, ou qu’on veuille conquérir par soi-même. La foi engage, mais elle suppose aussi qu’on ait laissé Dieu conduire. Dans la foi, il y a forcément un moment où l’on se laisse faire par le Seigneur, où l’on accepte que ce soit lui qui mène la danse – si vous me permettez l’expression. La deuxième lecture était d’ailleurs un beau témoignage de l’attitude qui permet la foi. « Qui a donné en premier à Dieu et mériterait de recevoir en retour ? ».
Enfin, Jésus confie une mission à Pierre. Une mission qui ressemble beaucoup à celle de gouverneur qu’Isaïe promettait à Eliakim dans la première lecture. A la différence qu’il ne s’agit plus de la clef de la maison de David, mais des clés du Royaume des Cieux. Il y a toujours un pouvoir, une responsabilité, mais il s’agit d’une responsabilité qui résonne jusque dans les cieux. Parce que le chrétien a reconnu qu’en Jésus le Ciel est venu sur la terre, il vit en sachant que ce qu’il fait sur la terre retentit dans le ciel. Il n’y a pas d’un côté ce que l’on fait sur la terre et de l’autre ce qui se passera dans le ciel : ce que l’on vit sur la terre nous prépare à la vie éternelle. C’est particulièrement vrai par les sacrements, mais c’est vrai aussi plus largement. Souvenons-nous des paroles du Jugement : « ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». Ainsi la foi n’est pas seulement un sentiment, mais une manière de vivre en reconnaissant que le Seigneur a donné à nos actions un poids d’éternité.
A Césarée-de-Philippe, Pierre le premier professe la foi chrétienne, et il nous permet de mieux comprendre ce qu’est la dynamique de la foi : un engagement personnel plutôt qu’une opinion, un don de Dieu qui nous invite à le suivre, l’aventure d’une vie à la mesure du cœur de Dieu.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Arche de la Nouvelle Alliance qu’elle nous apprenne à reconnaître le Christ. Miroir de la Sainteté de Dieu qu’elle nous rende disponible au don de Dieu. Porte du Ciel qu’elle nous guide pour que nous vivions à la mesure de ce qui nous est promis et que nous demeurions en Dieu comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.