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Père Charles Mallard-La peur de perdre ou la joie de donner ?

8 janvier 2023

La peur de perdre ou la joie de donner ?

Epiphanie du Seigneur

Is 60,1-6 ; Ps 71 ; Ep 3,2-3. 5-6 ; Mt 2,1-12

Voici donc la fête de l’Épiphanie. C’est évidemment le jour où nous nous souvenons de l’adoration des mages. Mais le but de cette fête n’est pas de compléter la crèche en rajoutant trois santons supplémentaires. L’Épiphanie et Noël sont comme les deux faces de la même pièce : deux aspects du même mystère. Noël, ce sont les événements ; l’Épiphanie, c’est le sens. À Noël, on se souvient que Jésus est né ; à l’Épiphanie, on se souvient qu’il est venu pour tous les hommes. C’est d’ailleurs ce que disait saint Paul dans la deuxième lecture : le mystère du Christ, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse.

En effet les mages sont signes que tous les peuples, peuvent venir jusqu’à l’enfant de la crèche. Ils nous rappellent que tout le monde est concerné par le Christ, que l’évangile n’est pas destiné à un petit cercle de privilégiés mais qu’il est pour tous les hommes, quelques soient leur race, leur âge ou leur histoire. Tout le monde peut offrir l’or de la charité, parce qu’à tous les hommes est confié l’héritage et cet héritage c’est le ciel et la terre. Tout le monde peut offrir l’encens de la foi, parce que tous les hommes sont destinés au même corps, et ce corps, c’est l’Église qui prépare l’union de l’humanité en Dieu. Tout le monde peut offrir la myrrhe, le parfum précieux, de l’espérance parce qu’à tous les hommes est faite la même promesse, et cette promesse, c’est la vie éternelle. L’Épiphanie, c’est en quelque sorte la fête de l’universalité de l’évangile.

Mais il y a un problème. Et ce problème est bien décrit dans le texte que nous avons entendu. Même si bien souvent on n’y fait pas très attention. Le problème est le suivant. On a dit que le sens de l’adoration des mages, c’est que tous les peuples sont concernés par la naissance du roi des juifs … Mais en même temps, Hérode, les chefs des prêtres et les scribes de Jérusalem, eux qui sont juifs, eux qui par excellence devraient être concernés par la naissance du Messie, restent indifférents. Ceux qui ne sont pas concernés s’y intéressent, ceux qui sont concernés ne s’y intéressent pas ! C’est un peu paradoxal ! Tant mieux pour les uns, tant pis pour les autres ? Peut-être, mais cela vaut la peine quand même de voir ce qu’il faut éviter, pour ne pas finir dans le mauvais groupe !

Dans l’évangile on parle de trois attitudes d’Hérode, trois attitudes qui s’opposent à l’accueil du mystère. La première attitude, c’est l’inquiétude. Hérode est pris d’inquiétude. Il a peur de perdre son pouvoir. C’est qu’il n’est pas héritier, il est conquérant. Son trône il le tient de lui-même, et de ses arrangements. Puisqu’il ne reconnaît pas ce qu’il a reçu, il a peur de perdre ce qu’il a conquis.

La deuxième attitude c’est le secret. Il convoque les mages en secret. Il ne s’agit pas d’un secret de discrétion, mais d’un secret de rétention. Ce n’est pas le secret qui respecte ce qui ne le regarde pas, mais le secret de celui qui veut garder les informations qui lui permettront d’avoir un avantage. C’est que Hérode ne fait pas corps, il se considère différent, au-dessus des autres.

Enfin la troisième attitude, c’est la machination. On sait bien que la consigne qu’il donne aux mages est hypocrite. Il ne veut pas aller se prosterner devant l’enfant, il veut l’éliminer, mais il a peur de s’impliquer, de s’engager. Il ne veut pas se salir les mains. Puisqu’il se veut auteur de son propre avenir, il n’attend pas la réalisation d’une promesse, alors il n’a pas d’espérance seulement un plan.

Mais nous, que ferons-nous face au mystère ? Serons-nous comme Hérode dans l’inquiétude, le secret et la machination, ou bien à l’exemple des mages, accepterons nous d’être héritiers, de participer au corps du Christ, de partager la promesse de la vie éternelle ?  Choisirons-nous la peur de perdre ou la joie de donner ? Préfèrerons-nous le secret de l’égoïsme ou l’ouverture de la confiance ? Nous laisserons-nous entraîner par la machination et les calculs ou bien saurons nous répondre à la promesse par l’engagement ? Parce que la charité ne comptabilise pas, la foi n’est pas solitaire, l’espérance ne se vit pas par procuration, nous ne pourrons entrer dans le mystère du Christ que si nous lui présentons l’or de notre générosité, l’encens de nos intercessions, et la myrrhe de nos engagements

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, qui retenait tous ces événements et les méditait en son cœur, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Elle qui est la Demeure précieuse, qu’elle nous apprenne à reconnaitre les grâces que le Seigneur nous fait pour être capable de donner à la mesure que nous avons reçue. Elle qui est le Temple de l’Esprit Saint, qu’elle nous affermisse dans la prière pour que nos supplications soient à l’image de la sollicitude de Dieu et que nous sachions présenter au Seigneur les besoins de tous nos frères. Elle qui est la Mère de l’espérance, qu’elle nous soutienne dans l’engagement pour que nous puissions œuvrer à la venue du Royaume et hâter le moment où Dieu sera tout en tous pour les siècles des siècles.

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