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Père Charles Mallard-La salutation pascale

31 mars 2024

La salutation pascale

Dimanche de la Résurrection – Messe du Jour

Ac 10,34a.37-43 ; Ps 117 ; Col 3,1-4 ; Jn 20,1-9

Chez les chrétiens orientaux, il est de coutume, entre Pâques et Ascension, d’utiliser la salutation pascale. On ne souhaite pas simplement que le jour soit bon ou que la paix soit avec celui qu’on rencontre, mais on dit « le Christ est ressuscité ! » à quoi l’on répond « Il est vraiment ressuscité ! »

Le Christ est ressuscité ! C’est d’abord le cœur de notre foi chrétienne. On peut disserter longuement sur ce que c’est qu’être chrétien, on peut décrire les rites, décliner les valeurs, détailler l’histoire, tant qu’on n’évoque pas la résurrection du Christ, on reste à la superficie des choses. Il n’y a rien dans l’église qui ne se comprenne pas à la lumière de la Résurrection. Le baptême n’est pas une habitude familiale pour calmer les angoisses de la grand-mère et honorer les parrains et marraines : c’est la participation au mystère de Pâques, c’est être plongé dans la mort et la résurrection du Christ. Les obsèques chrétiennes ne sont pas un simple souvenir ému du défunt regretté mais le rappel de l’espérance qui nait de cette promesse de la Résurrection : « quand paraîtra le Christ votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire ». La croix n’est pas un bijou esthétique astucieusement géométrique, c’est le signe du commencement du grand mystère, la clé de la Résurrection. Même la fête de Noël n’a pas beaucoup d’intérêt sans la Résurrection. Annoncer : « Le Christ est Ressuscité » c’est d’abord une profession de foi, la profession de notre foi

Car il s’agit bien d’une annonce. La résurrection n’est pas découverte, elle est annoncée. Même le disciple que Jésus aimait, entrant après Pierre dans le tombeau au premier jour de la semaine, ne déduit pas tout seul de ce qu’il voit, ou de ce qu’il ne voit pas, que Jésus est ressuscité d’entre les morts. Comme le rappelle l’évangéliste, à ce moment-là, le disciple comprend ce qu’annonçaient les Écritures. La résurrection ne s’observe pas. Ce qui s’observe c’est la disparition du corps, la pierre du tombeau enlevée, les linges posés à plat. Mais cela ne suffit pas pour croire, ni à Marie Madeleine, ni à Pierre. La Résurrection est une révélation, elle est même le sommet de la Révélation. On l’accepte ou on ne l’accepte pas, mais on ne la démontre pas. Saint Pierre à Césarée, rappelle que le Christ ressuscité ne s’est pas manifesté à tout le peuple, mais à quelques-uns. Il n’est pas allé se promener dans le Temple pour narguer les grands prêtres et épater la foule. La résurrection ne s’observe pas, elle ne s’impose pas, elle se propose et elle s’annonce, pour que ceux qui le veulent bien l’accueillent et y croient.

A cette annonce, la salutation pascale répond : « Il est vraiment ressuscité ». C’est l’expression d’une foi partagée. Mais c’est aussi une sorte de confirmation et le rappel que la foi n’est pas une démarche solitaire, qu’elle se vit avec d’autres, en église. La foi chrétienne n’est pas une opinion privée qui ne concerne que nous, c’est une dynamique commune. « Recherchez les réalités d’en haut » conseillait saint Paul. J’aime bien cette image de celui qui regarde vers le haut et qui incite ainsi ceux qui passent à regarder, eux-aussi, vers le haut. Que la salutation pascale ne soit pas symétrique, qu’on ne réponde pas simplement en répétant ce que l’on a entendu, est une bonne indication du fonctionnement de l’Église. Il ne s’agit pas d’être tous pareils, répétant un slogan pour lui donner sa force : c’est dans nos différences que l’on s’encourage et qu’on progresse. L’autre n’est pas un miroir qui me conforte mais la porte qui me conduit au Seigneur.

Enfin, à la salutation orientale, on aime bien rajouter le mot « alléluia » qui est comme le marqueur de la joie pascale. Depuis le mercredi des Cendres, on a jeûné de ce mot, et voilà que depuis cette nuit, on l’utilise en abondance, le disant et le répétant. Alléluia ! C’est le mot de Pâques. C’est un mot hébreu qui signifie « louez Dieu ». Comme ce n’est pas notre langue, on peut passer à côté de son caractère d’invitation. Alléluia, ça ne signifie pas « je loue Dieu », ni même « loué soit le Seigneur » mais « louez Dieu ». Évidemment, c’est une invitation qu’on partage en la faisant résonner : si l’on invite les autres à louer le Seigneur, ce n’est pas pour qu’ils le fassent à notre place ! Ainsi « Alléluia » est-il le rappel que nous sommes concernés par la Résurrection et le mystère de Pâques. « Vous êtes ressuscités avec le Christ » disait saint Paul, et saint Pierre concluait son discours chez le centurion en affirmant : « Quiconque croit en lui reçoit par son nom le pardon des péchés ». Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Que le Christ soit ressuscité, tant mieux pour lui ! Mais en fait tant mieux pour nous aussi, car sa résurrection nous ouvre les portes de la vie divine. Et si on loue le Seigneur, ce n’est pas parce qu’il a fait de grandes choses, mais parce qu’il les a faites pour nous. Et qu’ainsi nous sommes devenus capables de rayonner de la lumière de Pâques, dans le pardon, dans l’espérance et dans le service, dans tout ce qui manifeste un amour qui rend la vie plus forte que la mort, un amour qui fait jaillir la lumière dans les ténèbres.

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous accompagne dans la grande joie de Pâques. Porte du Ciel qu’elle ouvre nos cœurs à la bonne nouvelle de la Résurrection. Mère de l’Église qu’elle nous entraine à partager la vie nouvelle que nous avons reçue par le baptême. Reine des Saints qu’elle nous fasse rayonner de la Lumière du Christ pour que nous fassions retentir dans tout l’univers la salutation pascale : Le Christ est ressuscité ! Alléluia ! Il est vraiment ressuscité ! Alléluia !

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