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Père Charles Mallard-L’eucharistie, école de liberté et d’amour

28 mars 2024

L’eucharistie, école de liberté et d’amour

Jeudi Saint – Messe de la Cène du Seigneur

Ex 12, 1-8.11-14 ; Ps 115 ; 1 Co 11, 23-26 ; Jn 13,1-15

Avec la messe en mémoire de la Cène du Seigneur, nous entrons, ce soir dans le mystère de Pâques, et donc au cœur de notre foi. Chaque année nous sommes invités à ralentir un peu notre rythme quotidien, faire comme une retraite au cœur de l’ordinaire et prendre le temps d’entendre ou de réentendre ce qui nous fait vivre. Un peu comme on feuillette un album de famille pour nous souvenir des moments forts, pour revivre des événements intenses qui nous ont marqués.

Ce soir, donc nous revivons le dernier repas du Seigneur … nous voilà devant le mystère de l’eucharistie. J’aime bien me rappeler ce que disait Saint Jean Paul II aux jeunes lors d’une Journée Mondiale de la Jeunesse : « L’eucharistie, reçue avec amour et adorée avec ferveur, devient une école de liberté et de charité pour réaliser le commandement de l’amour ». Prenons donc le temps de comprendre comment l’eucharistie nous apprend à aimer à la manière de Dieu.

Dans l’eucharistie, Dieu se donne à nous, pleinement, corps et âme. Dans la Bible, en effet, le sang est le lieu de l’âme : lorsque le sang ne circule plus, le corps cesse de vivre. Recevoir le corps et le sang du Christ, c’est donc recevoir le Christ, non pas une partie du Christ, mais le Christ tout entier qui se donne à nous. L’eucharistie est le signe et la preuve que Dieu nous aime, et elle nous rappelle qu’aimer c’est donner, tout donner et se donner soi-même.

Mais il y a autre chose. Aujourd’hui, dans la fête de l’Eucharistie, on lit l’évangile du lavement des pieds. C’est dans le même repas que Jésus a consacré le pain et le vin comme son corps et son sang, et qu’il s’est mis à genoux pour laver les pieds de ses apôtres. Les prêtres savent bien qu’avant d’être prêtres, ils sont diacres, c’est-à-dire serviteurs. L’eucharistie nous renvoie donc non seulement au mystère de la présence de Dieu dans le pain et le vin, mais aussi au mystère de la présence de Dieu dans l’autre, dans celui qui a besoin de nous. « Ce que j’ai fait pour vous, faites-le les uns pour les autres ». Aimer, ce n’est pas entretenir de grandes idées, ou se complaire dans de bons sentiments, c’est concrètement se mettre au service de l’autre. Dans le langage courant le mot « charité » signifie plus ou moins l’aumône. Pourtant, c’est d’abord le mot qui désigne l’amour de Dieu, l’amour à la manière de Dieu. Et cet amour n’est pas platonique, c’est un amour qui s’engage, un amour qui agit.  Voilà une autre chose que nous apprend l’eucharistie : Aimer, c’est s’engager et servir.

Cela dit, pour être honnête, le mystère de l’eucharistie n’est pas toujours évident à vivre et encore moins à comprendre. Reconnaître la présence du Christ à travers l’apparence du pain et du vin, cela suppose de notre part un acte de foi. C’est même la raison pour laquelle on répond « amen » au prêtre qui nous présente l’Eucharistie. On ne répond pas « merci » mais « amen », c’est-à-dire « Je crois ». Amen c’est le mot de la foi. Parce que l’amour ne se reçoit pas sans confiance. Les époux le savent bien, eux qui passent leur vie à se donner des preuves d’amour. Mais toute une vie ne suffit pas à prouver l’amour, parce que l’amour ne se prouve pas comme une vérité scientifique, il se reçoit dans la confiance. Il y a même comme un cercle entre l’amour et la foi : plus on aime et plus fait confiance, plus on fait confiance et plus on aime. D’une certaine manière l’eucharistie nous provoque et nous interroge, elle nous demande : crois-tu ? Et, par cette question, elle nous enseigne qu’aimer c’est croire et faire confiance.

Mais qui peut nous obliger à croire ? Personne ! La foi est un acte libre, ce n’est pas quelque chose qu’on subit, c’est quelque chose qu’on décide. « Ma vie, nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne » dit Jésus. À cette liberté de Jésus qui se donne répond notre liberté de croyant. Ça ne veut pas dire que nous maîtrisons tout, mais nous entrons librement dans un mystère qui nous dépasse. Choisir librement quelque chose de plus grand que nous, c’est une manière de progresser, d’aller au-delà de ce que nous connaissons. Ainsi l’eucharistie vient nous révéler que l’amour est un choix, qu’il ne peut exister que si nous sommes libres, et que ce choix nous fait avancer, nous permet de grandir et de nous dépasser sans nous anéantir.

Aimer c’est tout donner et se donner ; c’est s’engager et se mettre au service des autres ; c’est croire et faire confiance ; c’est choisir librement et se dépasser. Voilà, rapidement, quelques repères que nous donne l’eucharistie pour nous apprendre à aimer

Ce soir, nous sommes invités à accompagner Jésus au jardin des Oliviers à travers un moment d’adoration au reposoir. Dans ce temps qui nous est proposé, nous pourrons, continuer à méditer et à approfondir ce grand mystère qui nourrit notre vie spirituelle. Nous pourrons prendre le temps d’apprendre de l’Eucharistie ce qu’est l’amour. L’amour de Dieu pour nous et l’amour de nous pour Dieu, l’amour que nous pouvons avoir les uns pour les autres, l’amour qui dépasse les frontières, l’amour qui s’étend à tous les hommes et qui transforme le monde. Comme le disait sainte Térésa de Calcutta – « le fruit du silence, c’est la prière ; le fruit de la prière, c’est la foi ; le fruit de la foi, c’est l’amour ; le fruit de l’amour, c’est le service ; le fruit du service c’est la paix »

Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Refuge des Chrétiens, qu’elle ouvre nos cœurs à ce que l’Eucharistie nous apprend. Reine de la Paix, qu’elle nous rende disponibles à vivre ce que nous contemplons. Mère du Bel Amour, qu’elle nous entraine à la suite du Christ, pour que nous laissions nos cœurs battre au rythme du Cœur de Dieu et demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.

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