Père Charles Mallard-Le Royaume de la Vie
Le Royaume de la Vie
Christ Roi de l’Univers – Année A
Ez 34,11-12.15-17 ; Ps 22 ; 1 Co 15,20-26.28 ; Mt 25,31-46
La fête du Christ Roi de l’univers, marque la fin de l’année liturgique, et (comme depuis quelques semaines), les textes de la Parole de Dieu nous invitent à penser à la fin des temps. Comme le décrivaient, chacun à leur manière, Ézéchiel et saint Paul, la fin des temps, c’est d’abord l’avènement du Royaume de Dieu, le temps où se manifeste en plénitude la Royauté du Seigneur. A travers les mots du prophète nous comprenons que cette plénitude est marquée par l’épanouissement de la vie : la brebis perdue est ramenée, la brebis blessée est soignée, la brebis affaiblie est fortifiée. Les paroles de l’apôtre sont peut-être un peu plus abstraites, mais elles rappellent aussi la plénitude de la vie, en évoquant une progression jusqu’à l’aboutissement : le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort.
Puisqu’il y a progression, cela signifie qu’on va du moins vers le plus. C’est la même dynamique qui est suggérée dans l’évangile à travers les paroles du Roi aux justes : « recevez en héritage le Royaume ». Hériter, ce n’est pas passer de rien à tout, mais de moins à plus. L’héritier se dispose à recevoir, jusqu’au moment – qui ne dépend pas de lui – où il reçoit l’héritage. Il y a bien une dynamique où l’on doit veiller au moins pour accueillir le plus. En l’occurrence, puisqu’il s’agit du Royaume de Vie, le plus nous est donné par la résurrection du Christ, mais nous devons veiller au moins, c’est-à-dire combattre ce qui conduit à la mort.
C’est bien ce qu’évoquent les œuvres rappelées par l’évangile : la faim et la soif menacent la vie corporelle. Être étranger – Jésus n’a pas parlé de touriste – c’est être privé de ses repères, de ce qui nous rassure et nous réconforte ; c’est une fragilité comme la nudité qui dépouille de ce qui protège. Autant de situations qui menacent la vie psychique. Enfin le malade et le prisonnier sont isolés, et cet isolement menace la vie sociale qui nous est aussi indispensable que la vie corporelle ou la vie psychique. Il y a bien, dans ce qu’on a coutume d’appeler les œuvres de miséricorde, un combat qui rejoint le combat du Christ, pour préserver la vie du corps, de l’esprit et du cœur. Et participer à ce combat, nous dispose à recevoir la victoire suprême, celle de la résurrection.
Peut-être certains penseront qu’ils ont suffisamment à faire pour préserver en eux la vie, face aux difficultés et aux épreuves. Le combat spirituel n’est-il pas déjà, pour chacun de nous, une participation au combat du Christ pour permettre l’avènement du Royaume ? Sans aucun doute, mais l’évangile nous rappelle que nous ne sommes pas les seuls vivants et qu’on ne défend pas la vie en ne s’intéressant qu’à la nôtre. D’une certaine manière, les textes que nous avons entendu les dimanches précédents nous invitaient à protéger la vie en nous ; l’évangile de ce dimanche nous invite à protéger la vie autour de nous. Sans cette attention aux autres, la vigilance ne serait qu’égoïsme. Il n’y a pas de vie spirituelle sans ouverture du cœur : le Seigneur ne nous est pas réservé : il est présent dans ceux que nous pouvons aider.
Reconnaître le Christ comme Roi de l’Univers, c’est reconnaître qu’il est concerné par tout et par tous. Pour hériter du Royaume préparé depuis la fondation du monde, il faut se disposer à accueillir la victoire sur la mort, en combattant ce qui menace la vie du corps, de l’esprit et du cœur.
Que la Vierge Marie, Avocate des Toulonnais, nous aide à entendre cette parole et à la mettre en pratique. Santé des infirmes qu’elle ouvre nos yeux à toute détresse ; Consolatrice des affligés qu’elle nous façonne un cœur selon le cœur de Dieu ; Refuge des pécheurs qu’elle nous dispose à hériter du Royaume en nous unissant à l’œuvre du Christ pour que la bonne nouvelle retentisse là où nous sommes et que nous puissions demeurer en lui comme il demeure en nous, dès maintenant et pour les siècles des siècles.